vendredi 22 juin 2012

La carte noire des indépendants publiée par l'AJP

L'AJP a publié dans le dernier numéro (138) de Journalistes une carte noire des indépendants de Rossel. Depuis le 22 juin, cette carte noire, est diffusée in extenso sur le site de l'AJP, ainsi que de nombreuses autres données sur le statut des journalistes indépendants.
Parce qu'on peut gager qu'aucun quotidien ne se hasardera à la publier, les indépendants de Rossel et d'ailleurs (l'"ailleurs" étant souvent encore pire) ne peuvent compter que sur les réseaux sociaux pour la faire connaître.N'hésitez pas à la diffuser ou à en faire circuler le lien.

Cette histoire aurait dû être du pain béni pour les journaux d’un groupe de presse toujours prêt à traquer les faux pas, à s’élever contre les inégalités et à avoir "toujours raison de l’ouvrir". Imaginez plutôt : des collaborateurs à qui l’on impose d’autoriser la reprise gratuite de leur travail pour une autre entreprise. Sans aucune contrepartie financière. Cela ne leur plaît pas ? La porte de sortie est grande ouverte. Cette histoire ne sera pourtant jamais publiée dans les pages du Soir ou des titres de Sudpresse. Elle pourrait se résumer en un mot : synergies. Un mot qui planait sur les rédactions depuis belle lurette, mais qui s’est brusquement matérialisé fin du mois de mars. Le pitch ? Un beau jour, Rossel, propriétaire du Soir et de Sudpresse (La Meuse, La Nouvelle Gazette, La Province, Nord Eclair et La Capitale), a concocté un plan d’enfer pour réaliser des économies. Il faut dire que ces journaux – comme à peu près tous leurs concurrents – vivent des jours financièrement difficiles. Les esprits chagrins souligneront que cela n’a pas empêché Rossel d’investir des millions dans un nouveau système informatique, mais ne pêchons pas par excès de critique. Le business a sans doute ses raisons que la raison des travailleurs ignore. Bref, l’heure est donc à l’austérité. Les dirigeants sont partis d’un constat : n’est-il pas un peu bête, étant propriétaires de deux titres concurrents, de voir chaque jour, par la force des choses, des sujets similaires publiés dans ces quotidiens et, surtout, de rétribuer deux fois ceux qui les rédigent ? La solution est simple, pardi ! Il suffit de s’échanger gratuitement les contenus. Tant pis pour les lignes éditoriales différentes, tant pis pour la pluralité de la presse, tant pis pour les lecteurs, tant pis pour les journalistes.

Depuis mars, les rédactions régionales et sportives du Soir et de Sudpresse sont donc priées de s’échanger leurs contenus, qualifiés "à faible valeur ajoutée". Sans aucune rémunération complémentaire. Pour les salariés qui ont cédé leurs droits d’auteurs à leur employeur, passe encore (façon de parler). Mais pour les indépendants (dont ces rédactions régionales sont abondamment peuplées), qui restent maîtres de leurs droits, la pilule passe mal. Payés à l’article, ils s’apprêtent à voir leur espace rédactionnel – et donc leurs revenus – fortement réduits. Certains souhaiteraient pouvoir refuser ce système. Par conviction, par intégrité ou simplement pour des questions de survie financière : travaillant également pour d’autres quotidiens, voir leur nom publié chez un concurrent direct signerait immédiatement la fin de leur collaboration. Or, si les collaborateurs du Soir ont reçu une assurance verbale de ne pas être sanctionnés (après que deux d’entre eux le furent…) en cas de refus des synergies, ceux de Sudpresse ont eu un message clair : tu acceptes ou tu te casses. La lettre envoyée dans la foulée par cet éditeur ne pouvait être plus limpide : "Nous ne pourrons maintenir une collaboration qu’avec ceux et celles qui accepteront …". Pour défendre leurs droits, les freelances se constituent en un "Collectif des indépendants de Rossel", représenté par l’Association des journalistes professionnels (AJP). Celle-ci con-tacte les rédacteurs en chef, afin d’entamer une négociation. En effet, ces synergies bafouent les règles élémentaires du droit d’auteur, qui stipulent – en résumé – que plus un article est diffusé, mieux il doit être rétribué. Sudpresse fait la sourde oreille. Le Soir, poussé dans le dos par un préavis d’action décrété par ses salariés, reçoit l’AJP. Mais la direction ne bouge pas d’un poil. Tout juste concède-t-elle du bout des lèvres que ceux qui le souhaitent peuvent refuser que leurs articles soient repris. Même si, dans les faits, craignant qu’une telle prise de position ne fragilise davantage leur situation déjà précaire, beaucoup préfèrent accepter à contrecœur…

Un indépendant, la plupart du temps, n’a pas choisi son statut. Mais il y a été contraint. Condition sine qua non pour mettre un pied dans un secteur où les postes de salariés maigrissent à vue d’œil (tiens, encore une autre conséquence des restrictions budgétaires). Un indépendant est payé au signe ou au forfait journalier. Tout dépendra de la publication. Mais dans les deux cas, sa rétribution n’a pas été augmentée, ni même indexée, depuis 15 ans. Au Soir, il est payé 0,025 € le signe, soit 62,5 € pour un article "standard" de 2.500 signes. On serait presque gêné de coucher sur papier les tarifs pratiqués par Sudpresse : de 0,010 à 0,012 € le signe. Soit environ 25 € l’article "standard". Celui qui travaille au bureau une journée entière (10h) sera rétribué 100 €. Tous ces tarifs s’entendent brut, cela va sans dire. Quatre journalistes indépendants sur 10 gagnent moins de 2.000 euros brut par mois. Pour des diplômés universitaires, dans la majorité des cas. Un indépendant ne passe pas sa vie à courir le monde, ne peut se permettre d’enquêter pendant de longues semaines. Pas de rédaction, pas de rétribution. Un indépendant doit afficher une disponibilité sans faille, travailler les week-ends sans voir la couleur du moindre euro supplémentaire, être prêt parfois à réaliser des tâches que d’autres n’ont pas le temps/l’envie d’accomplir. Un indépendant n’a que peu d’espoirs de progression. Ben oui, souvenez-vous, l’absence d’indexation, tout ça… 

Si nous n’aimions pas notre métier…

Mais un indépendant vit pour son métier. Il en est fier, il l’a choisi malgré toutes ces difficultés. Nous ne voulons pas l’aumône. Nous ne crachons pas dans la soupe. Tout serait sans doute plus simple si nous n’aimions pas notre journal… Nous demandons simplement de la considération. Le respect de nos droits élémentaires. La possibilité d’exercer notre journalisme librement, dans de meilleures conditions. Nous allons continuer de nous faire entendre et de défendre nos droits. Nous avons choisi d’informer. Et, comme l’AJP, nous demandons au gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles qu’il s’interroge sur la pertinence des aides directes qu’il accorde à la presse (1,3 million € pour Le Soir et 1,6 € pour Sudpresse par an) alors que ces deux titres bafouent délibérément leurs obligations, comme celle de respecter la législation sur le droit d’auteur. Mais jusqu’à présent, même si une entorse est constatée, la ministre compétente, Fadila Laanan (PS), continue de verser ces subsides, parce qu’il n’y a pas de sanctions graduelles.
Notre combat peut vous sembler obscur, lointain, inintéressant, médiatico-médiatique. Pourtant, il nous concerne tous. Parce que tout le monde a le droit à une information de qualité, à la pluralité des opinions, à des journaux aux contenus non-uniformisés. Parce que, pour cela, il faut que les journalistes, y compris les indépendants, puissent effectuer leur travail dans des conditions décentes. Parce que, même si certains préfèreraient qu’on la ferme, on aura toujours raison de l’ouvrir.
Le collectif des indépendants du groupe Rossel

 

samedi 9 juin 2012

Au Soir, coup de balai dans les ménages


Désolé de cette absence mais entre le congé de l’un, le vilain microbe (heureusement parti) de l’autre et pas mal de travail aussi, nous sommes passés à côté d’une palpitante actualité au Soir. Il y a bien sûr le départ de Jurek Kuczkiewicz (au soulagement général, sauf le sien et celui du service Monde qu’il va réintégrer) et aussi le déplacement de Pierre-Yves Warnotte (dans l’indifférence générale, sauf celle du service Economie dont il prendra la tête en septembre). On ne reviendra pas non plus sur le journal numérique, confidentiellement présenté à une rédaction qui s’est empressée d’en partager – au grand dam de Didier Hamann  – les grandes lignes avec La Libre Belgique. On ne s’étendra pas davantage sur ce qui attend les lecteurs dès cet été, ils le découvriront bien assez tôt.
Un des emails reçus par Presse-Citron a néanmoins retenu notre attention : le Soir se prépare à donner un grand coup de balai dans les ménages de ses journalistes. De quoi donner des sueurs froides à certains collègues salariés qui, lorsqu’ils ne s’étonnent pas dans les colonnes de leur journal de l’obstination des politiques à cumuler mandats, professions et activités diverses, courent les rédactions pour piquer des piges aux indépendants, aident un ami cinéaste à peaufiner son scénario, etc. Tant et si bien qu’on ne sait plus qui fait quoi et surtout que ce « quoi » n’est pas toujours avantageux pour la réputation du Soir. Il fallait donc y mettre « un peu de clarté ».
« Toute activité complémentaire rémunérée nécessite {dès lors} l’accord préalable de la direction à son exercice », a ainsi rappelé Didier Hamann. Qui avoue « être parfois surpris d’apprendre, incidemment, que tel ou tel journaliste prête sa collaboration à l’écriture d’un ouvrage ou d’un scénario, écrit des piges, enseigne ou dispense des formations, voire organise des expositions. »
Le directeur-rédacteur en chef n’entend pas nécessairement « remettre en cause ces autorisations » mais à tout le moins, mettre de l’ordre dans tout ce bazar.  Dès lors, pour le mois de septembre, « toute collaboration devra avoir fait l’objet d’une autorisation en bonne et due forme. » L’objectif étant, in fine et on s’en doutait car c’est une préoccupation constante des patrons de presse, « de concilier les besoins d’épanouissement de nos journalistes et les bénéfices en termes d’image pour Le Soir ».


vendredi 25 mai 2012

L'histoire d'un gars



C’est l’histoire d’un gars qui a choisi de changer d’histoire. Ce gars, il est journaliste – pour peu de temps encore -, collaborateur au Soir et à l’agence Belga notamment. Un vrai de vrai, un passionné, rigoureux et honnête, un chouette bonhomme qui plus est. Souvent râleur, comme tous les Liégeois que je connais. Parfois coupeur de cheveux en quatre - mais n’est-ce pas ce qu’on attend des journaleux ? Forcément, il ne gagnait pas beaucoup mais ce pas beaucoup était encore de trop : il y a quelques semaines, sa collaboration au Soir avait provisoirement été suspendue en rétorsion de son refus de voir ses papiers gratuitement publiés aussi chez SudPresse. Récemment aussi, m’a-t-on dit, il avait été fort affecté qu’on reproche aux collaborateurs régionaux d’être source de gaspillage d’argent : pourquoi, en effet, leur commander des reportages si les même sujets pouvaient être traités pour moins cher par un collègue de SudPresse ?
Parce que les histoires écrites par des comptables ne sont pas de bonnes histoires, parce qu’elles sont rédigées de piètre façon et qu’on en devine généralement la fin, il a donc décidé de passer de l'autre côté du miroir. 

mardi 22 mai 2012

De la vitamine C pour le dernier numéro de Journalistes

"Des pigistes pressés comme des citrons" : le dernier numéro (157, mai 2012) du mensuel Journalistes, édité par l'AJP, a donné la parole à Presse-citron (qui vient d'ailleurs de se doter d'un compte Twitter : @lapressecitron).

Parce que tous nos lecteurs ne sont pas journalistes, voici une copie de cette interview :

Journaliste, un métier de rêve? Dans l'absolu, oui. Le métier reste passionnant : il est varié, intellectuellement enrichissant, nous permet d'assouvir une partie de notre curiosité et de rencontrer des gens plus méritants que nous le serons jamais. Il a aussi des ambitions de service au public : informer sans déformer, mentir ou trahir, décrypter et mettre en perspective, révéler parfois aussi. Mais, c'est peu de le dire, les conditions matérielles sont devenues très difficiles : les plans de restructuration se suivent et se ressemblent malheureusement, les embauches se font au compte-goutte et dans des conditions de moins en moins dignes, les piges se font de plus en plus rares pour les journalistes indépendants. De manière générale, nous pensons que l'information n'est pas un produit comme un autre, qu'on ne fabrique et ne vend pas des reportages comme des boîtes de petits pois. C'est malheureusement de moins en moins vrai et il en va aujourd'hui de la presse comme de la plupart des secteurs d'activité économique : contraintes de rentabilité, management de plus en plus agressif, etc. La pratique du métier est donc souvent très éloignée de l'image que s'en fait le public, le métier de rêve l'est de moins en moins. 

Qu’est-ce qui vous a poussé à vous regrouper pour créer « Presse-citron » ? Des synergies ont récemment été mises en place entre SudPresse et le Soir, essentiellement au niveau des régions. Un article écrit par un journaliste de SudPresse peut donc se retrouver dans Le Soir et inversement. La volonté du groupe est de faire des économies d'échelle. Ces synergies ont été imposées sans aucune concertation, sans que les journalistes indépendants (très nombreux en région) en soient officiellement informés, sans communication aux lecteurs et bien sûr sans compensation financière pour ces indépendants. Ces derniers, parce que les plus fragiles, font donc les frais de la politique d'austérité décidée par le groupe Rossel. Nous sommes quelques-uns à nous être informellement regroupés pour créer le blog Presse-Citron. Le but est double : attirer l'attention du public sur les conditions de travail imposées aux indépendants et informer les lecteurs sur ces synergies. Car nous pensons que cette fusion partielle des rédactions porte atteinte aux deux journaux : si un lecteur de SudPresse voulait lire des articles calibrés pour Le Soir, il lirait celui-ci. Et vice-versa. Nous savons que la presse vit des moments difficiles mais 1/Nous ne sommes pas persuadés que l'austérité est la seule voie possible, peut-être faudrait-il d'abord songer à une amélioration qualitative de l'offre  2/Si on nous démontre que des économies sont effectivement nécessaires, nous déplorons alors qu'elles se fassent une fois de plus sur le dos des collaborateurs indépendants et de manière aussi brutale. 


Pourquoi avoir choisi de vous exprimer, dans votre blog, sous le couvert de l’anonymat ? Parce que individuellement, nous travaillons avec les deux titres précités et que la direction de SudPresse a clairement fait savoir que ceux qui refuseraient que leurs articles soient gratuitement repris dans Le Soir n'auraient d'autre choix que d'arrêter leur collaboration. Le même chantage n'est officiellement pas de mise au Soir mais il y a quelques semaines, deux collaborateurs qui avaient refusé que leurs articles soient repris gratuitement dans SudPresse ont provisoirement été interdits de signature. Ils n'ont été réintégrés que parce que la rédaction s'est mobilisée. En clair, nous pensons que signer les articles de Presse-Citron nous exposerait à des représailles. D'autant plus difficiles à assumer pour les indépendants qui collaborent à ce blog puisqu'ils n'ont pas droit aux allocations de chômage. 

Quels sont vos objectifs, à travers ce blog ? Ce n'est qu'un modeste blog, fait sans moyens et avec peu de temps. Mais avec celui de l'AJP, il est une des seules plateformes qui informe le public sur les conditions de travail des indépendants et l'existence des synergies. Les conditions de travail imposées aux indépendants étant plus ou moins les mêmes dans presque tous les médias, on ne peut s'attendre à ce que ceux-ci relayent nos revendications. A notre connaissance d'ailleurs, seule la RTBF a parlé de ces synergies. Qui sait, par exemple, qu'une enquête de l'AJP a révélé que plus de la moitié des journalistes indépendants doit se contenter de 2300 euros bruts par mois? Que le montant de leurs piges n'a, dans plusieurs rédactions, pas été augmenté ni même indexé depuis plus de 10 ans?  Que lorsque les synergies ont été imposées, plusieurs collègues ont immédiatement perdu leur collaboration? Si ces inégalités touchaient un autre secteur d'activité, la presse s'en offusquerait et le public serait informé. Ici, personne ne sait rien. Ou feint de ne pas savoir. Journalistes, passionnés par notre métier, nous avons donc estimé que ces informations en valaient d'autres et avons choisi de les publier sur ce blog, faute de pouvoir le faire ailleurs. Nous allons maintenant assurer une plus grande publicité à ce blog et toute aide en ce sens est la bienvenue : parlez-en autour de vous, tweetez, facebookez, envoyez des courriels... 



dimanche 20 mai 2012

Fadila, es-tu là?

Le moins que l'on puisse écrire est que les synergies entre journaux francophones n'émeuvent pas le pouvoir politique, pas plus que le sort réservé aux collaborateurs de ces titres. Et tant pis pour la diversité d'opinion : que vaut en effet encore celle-ci lorsqu'un même journaliste est chargé de relayer dans deux ou trois médias (voire beaucoup plus lorsque cet indépendant est aussi le correspondant de l'agence Belga) le même événement, la même conférence de presse?
Hommes et femmes politiques n'ont pourtant pas les mains liées : on attend d'eux qu'ils s'inquiètent de ce pluralisme malmené, qu'ils soient plus vigilants aussi sur l'octroi des aides à la presse.

Régies par le décret du 31 mars 2004, ces aides directes sont gérées par le Centre d'aide à la presse écrite de la Communauté française (sous la tutelle de Fadila Lanaan) et ont été fixées à une somme de 6,2 millions d'euros, indexée depuis 2005.

On le voit sur le graphique ci-dessous (issu d'un rapport de la Cour des comptes adressé au parlement de la CF en janvier 2012), SudPresse est de loin le premier bénéficiaire de cette aide (1,6 million en 2009), suivi  des Editions de l'Avenir puis de Rossel.


Or, comme le rappelle un Courrier hebdomadaire du CRISP paru en 2005, cette aide est conditionnée au respect de clauses sociales : "Pour obtenir une partie de l'aide à la presse, les éditeurs devront en effet respecter les conventions collectives sectorielles ou conclues au sein des entreprises, les accords concernant les indépendants, la législation sur le droit d'auteur ou l'application du code de déontologie." De fait, le décret de mars 2004 fixant les modalités de cette aide à la presse stipule expressément dans son article 7§1er que l'entreprise n'est éligible que si elle applique et fait appliquer "les accords collectifs sectoriels et d'entreprise en vigueur pour les journalistes salariés et les accords applicables aux journalistes indépendants, les engagements pris en matière de formation et {le respect de} la législation sur les droits d'auteur."

L'élégant courrier adressé le 27 mars 2012 par la direction de SudPresse à ces collaborateurs ne contrarie-t-il pas l'esprit, sinon la lettre du décret? Nous ne résistons d'ailleurs pas à relire ensemble un extrait de ce grand classique signé Philippe Miest et Thierry Delhaye, réputés pour leur plume empreinte de poésie et d'humanité : "Vous comprendrez que nous ne pourrons pas appliquer ces synergies 'à la carte' en vérifiant à chaque fois le nom choix de chaque collaborateur" car "Au quotidien, cela constituerait un ingérable casse-tête." En conséquences, avertissent-ils la larme à l'oeil, "Nous ne pourrons donc que maintenir une collaboration qu'avec ceux et celles qui accepteront que leurs articles, photos et autres productions puissent également être publiés, sans rémunération complémentaire, dans Le Soir ou dans une autre publication du groupe Rossel."

Si ce chantage à l'emploi ne contrevient pas au nécessaire respect des droits d'auteur, on peut alors se demander pourquoi cette clause d'éligibilité a été ajoutée au décret.... Reste à Fadila Lanaan, ministre communautaire de la Culture et de l'Audiovisuel, à faire appliquer le texte et à tout le moins, à demander des explications aux éditeurs et à s'interroger sur l'usage qu'ils font de cet argent public.




Source du graphique ci-dessus: "Etat des lieux des médias d'information en Belgique francophone", réalisé en mars 2011 par les professeurs Frédéric Antoine de l'UCL et François Heinderyckx de l'ULB à partir des données de la SCRL Les Journaux francophones belges.




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lundi 14 mai 2012

Changement(s) en vue au Soir

Parce que le Soir, et plus généralement, la presse doit faire face "à des changements radicaux", deux "séances d'accompagnement" à l'attention des journalistes de la maison sont prévues dans les semaines qui viennent.
Il ne s'agira pas seulement de leur expliquer comment gérer ces changements mais aussi de les écoler pour affronter les "résistances", a prévenu Didier Hamman dans un email à l'attention de la rédaction. On espère que les collaborateurs indépendants ne feront pas les frais de ce nouveau plan de bataille mais qu'au contraire, ces réunions seront l'occasion de pacifier les relations entre l'un et les autres. 
Par ailleurs, l'organigramme devrait, lui aussi, être réorganisé puisque Thierry Tinlot, à la tête du service culture depuis un an, pourrait être remplacé par Xavier Flament, responsable des publications au Palais des Beaux Arts et que Huber Vanslembrouck, rédacteur en chef adjoint de SudPresse, pourrait - avec le même conditionnel - rejoindre la rédaction en chef du Soir.

vendredi 11 mai 2012

Le prix Belfius-Dexia encore attribué à un indépendant du Soir

Les prix Belfius du journalisme (anciens prix Dexia) ont été remis hier, jeudi 10 mai, à Bruxelles. Un travail publié dans Le Soir a, aux côtés de François Brabant du Vif et de Odile Deherte de la RTBF, été primé : J'ai risqué de me ruiner en multipliant les crédits, d'Olivier Bailly. Ce dernier est journaliste indépendant.
En 2011, Le Soir et ses indépendants avaient encore été mis à l'honneur avec Le Bonheur brut, un webdoc d'Arnaud Grégoire et avec David Leloup, collaborateur freelance auteur d'une enquête sur le vaccin anti H1N1.
L"année précédente, les deux prix accordés au Soir l'avaient été à des salariés, Hugues Dorzée pour une enquête sur les armes wallonnes vendues en Lybie et, en catégorie presse financière, Pierre-Henri Thomas et Philippe De Boeck pour une série sur la banque Kaupthing.
En 2009, c'est Joël Matriche, collaborateur indépendant, qui avait été récompensé pour un reportage sur les maternités nazies durant la Seconde Guerre mondiale. Il succédait lui même à Nicolas Crousse (salarié), auteur d'un portrait remarqué d'Yves Leterme.

Bien que travaillant avec peu de moyens, les collaborateurs indépendants du Soir ont donc raflé une bonne partie des derniers Prix Dexia/Belfius. Ce qui rend plus admirable la façon dont les considère aujourd'hui la direction.